Textes

 

 

Ecriture à partir de photographies (7 photographies d'Albi et alentours)

 

C’est ce que je vois dans l’interstice, un horizon dans la brume, des fleurs qui baissent la tête et regardent leurs pieds. Si tu ne me l’avais pas dit je ne saurais pas où je suis. Tu dis que c’est un champ de tournesols, que c’est une cathédrale plantée là-bas au fond à gauche. La terre paraît ingrate. Les fleurs sont parsemées, l’air semble épais et lourd.

L’homme a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu’il sourit mais il s’interroge à ras de terre, coupé du monde, seul dans sa tête. Il s’interroge devant le champs de tournesols, et ce qu’il cache en-dessous -profond- il faudrait creuser jusqu’aux fondations de ce bâtiment pointé vers le ciel pour savoir. Il y aurait un trésor. Ce serait celui de la vierge noire.

Venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique. La belle au sang noir. Elle les accompagne dans leur pèlerinage.

Le long du chemin il y a des tournesols qui regardent leurs pieds tellement ils ont honte. Et l’homme aussi qui leur tourne le dos.

M-L.R.

 

Le ciel était bleu, on dominait Albi, et les tournesols commençaient à perdre la tête. Ils étaient eux si tristes en ce début de journée, si chauds déjà et pas envie, malgré la si jolie chanson de Nana de se tourner vers le soleil. Ils faisaient la gueule, quoi ! Pourtant la journée s’annonçait magnifique. Hé, les tournesols, chaque jour est à vivre, haut les coeurs... d’artichaut. Enfin, leurs têtes inclinées nous permettaient de bien voir l’horizon brumeux, là où le ciel et la terre se rejoignent, là où j’aimerais, comme sur une palette de peintre, mélanger vraiment pour obtenir une nouvelle couleur. Désert le paysage, aucune présence humaine, sauf peut-être de ces murs blancs de maisons lointaines... que s’y trame-t-il ? Imagination en route, zoom arrière... Je vois enfin ces deux arbres amoureux, qui se touchent... ils sont aveugles mais rassurés de cette proximité feuillue.

Maintenant deux platanes qui se touchent aussi, se donnant leur main de feuilles, à leur pied une présence humaine. Celle de Pierre et de pierre sculptée... Oui il était sculpteur Pierre Astre, et aussi colossal que ses têtes, aussi fort... en apparence... la suite a prouvé qu’il ne fallait pas si fier... Pacifié, qu’il dorme en paix. Je suis très heureuse qu’il soit là aujourd’hui parmi nous et qu’on lui doive deux images. Des paires, sans arrêt. Tout va par deux désormais dans ma tête... c’est si terrible, inhumain, la solitudine. Merci Pierre, ton visage sourit aux étudiants... comme un pain quotidien. J’espère qu’ils savent le voir.

Comme voir sur cette franche ligne d’horizon une Ste-Cécile bonzaïsée ... puis des arbres séparés, pour ça peut-être que les tournesols continuent à faire la tête. Notre Dame de la Drèche, priez pour nous pauvres pécheurs et nous nous prosternerons sur cette terre qui est quelque fois si jolie. N’est-ce pas Monsieur Prévert ? Mes yeux s’élèvent vers les cieux et je pense à papa. Il s’appelait Pierre aussi, et peut-être aussi fragile que mon ami artiste. « Notre père qui êtes aux cieux, restez-y » et prenez soin d’eux, St-Pierre, vous qui avez les clés. En haut il y a comme du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été... pas de note de musique, mais elle est en mon coeur.

Une musique faite de petits tas de sable, avec ses hauts, ses bas, comme la vie. Mon coeur est en partance possible... wagons obligent... je suis sur le quai, ça y est, je vais embarquer... comme Alicia. Quelle liberté soudain, enfin libre de choisir moi aussi ma destination. Je deviens Alicia, je suis jeune comme elle et ma vie est devant. Surtout ne pas passer à côté. Bien connaître sa route, son cap, ne pas se laisser dérouter. Quelle chance, Alicia, si jeune et déjà sûre de ses choix, si jeune, et se connaître si bien, et faire la plus grande chose au monde, savoir être soi. Alicia, je t’envie, ta vie fais-la belle. La Vie est belle, un de mes films culte. Voyage, ma fille, voyage.

Quitte ces cheminées, cette brumeuse pollution... liée à la chaleur promise, cette brume du matin et seulement cela ? Pas sûr. Albi qui ne cache rien nous dit chaque jour, nous avoue son taux de pollution quotidien. Je te veux des horizons purs et transparents.

Comme ta vie, Lili... Quitte ton pays, sois en exil. Moi, à ton âge, je n’aurais pas osé, même pas, surtout pas, aller vivre à Paris où mon frère, de onze ans mon aîné, était "monté". On emploie ce mot ferroviaire quand on rejoint la capitale, là où tout se passe. Enfin, lui, il rentrait sur ses chemins de fer, tous les week-end, parti trop tôt, peut-être. Il venait d’avoir dix-sept ans.

Haut les coeurs, on le sait plus tard, la Vie est un combat, les jolies danses sont rares, on l’apprend plus tard. Ils l’ont enfin compris les tournesols et arrêté de faire la gueule, les voilà, avec leurs gros plateaux qui se redressent enfin. Prêts à nous donner de l’huile... du professeur du même nom. Je vois la pub : elle est si légère cette huile, que le professeur s’envole. Léger, léger, léger. S’ils continuent leur réclame il va rejoindre les cieux, lui aussi. Haut les coeurs et à coeurs légers et vaillants... rien d’impossible, comme à la Se.ne.ce.fe, où la route de fer est tracée, comme une destinée... sous des tunnels parfois... et au bout la lumière céleste, divine.

Retour sur image de pierre... son autre visage. Il était peut-être Gémeaux comme papa. Je l’appelais Pierre qui rit, Pierre qui pleure. Ta sculpture, visage géant, est moins souriante, et surtout ton regard, pupille en exil, si vide... Tel un aveugle il voudrait voir les cieux si bleus... pour ne plus avoir de bleus à l’âme. Pierre tu es là, posée à jamais parmi nous et ce n’est pas un cimetière, bien au contraire. J’aime l’idée que des générations de jeunes en quête de savoir, à l’aller, au retour, passeront entre tes oeuvres et, suivant leur état d’âme du jour, verront le sourire, ou son absence. Ton sourire, Pierre. Comment le savais-tu que dans ce bloc de marbre à sculpter il y avait de si beaux visages. Je pense aux esclaves et à leur douleur de se dégager de leur gangue... ceux de Monsieur Ange.

N.P.

 

Quel étonnant paysage. Sont-ce des genêts qui parsèment cette plaine plate comme la main, du moins est-ce une expression que je tiens de mes aïeuls. Et cette barre dans le lointain, limitant le regard et faisant paraître le ciel plus pâle... Il émane de cet endroit un mystère angoissant qui commence à m’obséder.

Et voilà qu’au détour de ce paysage mélancolique une figure grimaçante s’impose au regard, posée là au bord du trottoir, abandonnée peut-être depuis des lustres, et qui semble implorer, de son oeil valide, la compassion du promeneur.

Revoilà cette plaine, toujours plus sombre, rehaussée cette fois d’un monument dont la silhouette me semble familière. Bien sûr, c’est la Drèche, construction de briques qui rosit doucement lorsque le soleil vient la saluer au lever du jour. Est-elle placée là pour contrebalancer la monotonie ambiante et donner l’espoir d’un renouveau au pèlerin en quête de sens ?

Poursuivant ma découverte, mes pas me conduisent à ce qui semble être une usine en panne d’animation où trônent, à l’abandon, des wagons immobiles, constructions aux ouvertures barrées. Pourtant il me semble qu’il ne faudrait pas grand-chose pour animer ce décor immobile, et que derrière, hors de la vue, se cache la ville et sa fiévreuse activité.

C’est décidé, je vais m’enfoncer dans cet espace trop calme et fouiller pour découvrir la vie.

C’est gagné. La ville se laisse voir comme une belle ville. Ce qui me choque c’est ce monstrueux cigare, planté au beau milieu, qui semble indiquer une direction conduisant peut-être dans le centre, là où je pourrai rencontrer des gens, dialoguer, échanger des impressions, me fondre dans la foule et sourire comme si je revenais de loin.

Le mirage de la ville est bien réel, ce fichu cigare m’a trompé, et je retrouve la plaine inconnue, toujours aussi triste. Elle m’offre comme un défi de maigres tournesols que le soleil n’arrive pas à jaunir, des feuilles qui virent au noir et encore cette désespérance diffuse qui recommence à m’obséder. Aurai-je la force d’aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout.

Quelle surprise, la tête reparaît -est-ce la même au moins- mais qui m’offre son meilleur profil, peut-être bourbonien, peut-être républicain- me faisant comprendre qu’il est inutile de vouloir changer la course de la vie et que l’on rencontrera toujours et de la douleur et de la joie selon que nos pas nous amèneront du côté pile ou du côté face de l’existence.

M.R.

 

Le cyclone continue de ravager les hauteurs d’Albi, les collines sont désertiques, la végétation souffre. La terre asséchée prend un aspect lunaire

Seul apparaît le Doigt de Dieu (La Drèche) dans ce ciel sans nuage.

Le brouillard encercle une masse méconnaissable. Hallucinant ! Ce tuyau dressé comme un I. Je sens cette fumée. Je suis oppressée.

Dans ce champ de tournesol, apparaît un personnage vêtu d’une pèlerine végétale qui relève sa tête, les autres la baissent. Demande-t-il de l’aide ? Nous avons soif...

Tel un Dieu, un gros bloc de pierre est tombé du ciel, la face tournée vers la lumière, une tête taillée à coup de hache, les yeux grands ouverts, exorbités, les narines gonflées, un demi-sourire.

Un deuxième bloc de pierre est posé face au premier. Chevelure au vent, nez aquilin. Sérieux ? C’est une oeuvre humaine.

E.G

 

En pleine campagne sous un ciel d’une insolence bleue, un camp où des réfugiés de la politique agricole errent sans but. Ils sont très affaiblis, le soleil les a abandonnés.
Pourtant cette belle journée réveille des géants antiques qui dorment dans les profondeurs de la terre dont un sort la tête pour profiter de la chaleur céleste.
Croyant encore dans la bonté divine, de loin, nos réfugiés implorent Notre Dame de la Drèche pour qu’elle donne du courage et hâte leur libération.
Leur prière a été entendue puisque déjà le quai de marchandises de la gare d’Albi apparaît. Déjà deux wagons sont en place pour les recevoir et leur joie est immense.
Ayant mis tout leur espoir dans la prière et ayant été exaucés, ils ne finiront pas dans les hauts fourneaux de cette usine qui détériore la vue d’ensemble de la ville.
Après avoir remercié Notre Dame de la Drèche les voilà regroupés autour de leur chef de file, prêts pour le départ, disant adieu à cette terre qui les a laissés dépérir.
Le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée à la gare. Celui-ci a fait la fac, ça lui a donné une grosse tête et le poids de ses études a écrasé son corps...

E.B.

 

Champ de tournesols dévasté, décimé dans la plaine, combattants du soleil désherbant, ciel sans nuage, sans dieu, sentinelle du courage, arbres secs verticaux, fatigués, ennemi au lointain, l’urbanisation et la chaleur, armure feuille, tête lourde, le végétal contre la chaleur, rang clairsemé

Météorite guerrier géant, de pierre, la civilisation de Champollion, Pierre Estie, hiéroglyphe- de petites fenêtres, la nature colonisée, les arbres au garde-à-vous, le buis définit un carré, aveugle malgré de grands yeux, un grand nez, une grosse bouche, de grandes oreilles, il semble tourné vers le ciel, passionné

La Drèche phare, château-église sentinelle, dans cette mer nourricière, le champ autour, horizontalité – cathédrale des champs à côté de la cathédrale des arbres, arrière garde, des tournesols ferment la marche. Les fils électriques à très haute tension essuient des décharges, arbres lieutenants à la frondaison éclatée veillent au loin

Alibi d’Albi, on ne va pas bâtir A. sur du sable, la ville rose des petits tas de sable, ville à chaux et à sable pour consolider des fortifications, les wagons d’Albi-Ville contiennent bien des surprises, peut-être sont-ils le menaçant métallique pour recueillir et amasser les grains de tournesol très loin – les wagons recellent des tas de tournesols prisonniers, les tas de cendres des tournesols chargés et déchargés, morts au combat.

Transformation par combustion du charbon en électricité, cathédrale du XXIème siècle, vu de la Drèche, civilisation industrielle en étendard, même la cathédrale bastion de la foi est perdue dans le lointain, vue panoramique sur la cité où le vert persiste en longs rubans qui suivent les rues. Platanes que cette coulée verte ? La ligne d’horizon- brume.

Au premier plan, un énorme tournesol, un personnage à la robe sombre qui se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baisse, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura – c’est le reste de la lumière. Derrière champ désertique et trouble. Dans cet océan de terre crayeuse, de pauvreté et de débâcle, même l’ancêtre semble se replier sur lui-même, dans un ultime combat de grandeur il semble porter sur ses épaules tout le poids de sa race.

Un cyrano triste et qui doute de sa mission civilisatrice après ce parcours dans les champs alentour. Mousquetaire à la retraite, bien droit dans ses bottes, il songe et contemple les siècles, figure décapitée, dubitative, pleine de mélancolie- Hidalgo des causes perdues. Ou Dali qui reste à faire seulement de la pub pour le chocolat Lanvin.

 M-C.N.

 

page atelier

 

         

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ecriture à partir de fragments imposés (extraits des textes écrits à partir des 7 photographies)

en italique : le texte écrit entre les fragments

Dans ce cadre splendide et lumineux, toute la ville bouge. Du palais de la Berbie au mont Fuji-Yama, un périple d’une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident. C’est ce que je vois dans l’interstice, dans ce cadre féerique de la ville. En haut il y a comme du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été. L’automne habille dame nature, de son manteau aux multiples couleurs. Le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu, dommage ce cadre est si beau. Qui-est-ce ? Un personnage à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baisse, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura –c’est le reste de lumière. Comme beaucoup mon père était venu par la gare en même temps que les mineurs polonais, travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique, la belle au sang noir. Le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée. Mais ! C’est le grand JAURES. Mon père, c’est lui, il a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu’il sourit mais il s’interroge, à ras de terre, coupé du monde seul dans sa tête. Aurai-je la force d’aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout.

M-C.B.

 

Ce que je vois dans l’interstice c’est l’intervalle du temps raccroché à celui de l’espace qui sépare les corps et ouvre une secrète issue. Inter..., interface, interprétation, c’est mon histoire entre sol et cil, brique et eau, aile et pas où je construis le rêve et où je me mesure au réel. Aurai-je la force d’aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout. L’intérieur des terres où les hôtes internés, alités, assis, couchés avec des bouts de bois, créent de petits arrangements avec la vie pour aller vers ce finistère qui n’est pas le bord de l’eau- mais le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu. Le rideau de lierre vient de tomber. Les algues, longue chevelure encore ruisselante de vent, sont à terre, accessoires des Walkyries, ces furies wagnériennes. Le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée, placide, il a pris racine dans la terre, ses longues jambes soutiennent un torse et une tête qui domine la vallée désertée. C’est le géant vert, maître trop grand d’un ballet dérisoire. Un personnage ( mais c’est mon double, resté dans l’ombre jusqu’alors) à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baisse, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura. C’est le reste de lumière. J’avance désormais dans une atmosphère dernière, glauque, ou dans des sables mouvants, je perds pied. Le sol se dérobe, je suis déracinée, je me fissure et me perds. En haut, ce seul repère, il y a du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été. Pas de fausse note, pas de note bleue non plus. Les cieux restent définitivements muets. Rien ne peux orienter mes pas quand lever un pied pour retomber plus bas encore demande un effort quasi surhumain. Engluement, engloutissement, dans cette boue noirâtre qui monte des puits noyés inexorablement. Venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique, la belle au sang noir. Eva est femme et sacrifiée de houille, de verre, d’électricité unicellulairement noire. Peut-elle être l’avenir de l’homme ? Peut-être. Elle est résignée. Ils ont usé leurs forces à produire de l’énergie qui fait tourner la terre. Au loin toute la ville bouge, avide, frénétique. Du palais de la Berbie au mont Fuji-Yama, un périple d’une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident. Jules Verne est largement battu, l’Orient Express, comité d’accueil, tambours, trompettes, Occident décadent. Mais l’homme reste entouré de boue. Il a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu’il sourit mais il s’interroge, à ras de terre, coupé du monde, seul dans sa tête, il n’a déjà plus de corps. Il attend sa fin à Omamara, la petite mexicaine morte étouffée par la boue sous le regard de plus de 800000 millions de spectateurs.

M-C.N.

 

L’homme a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu’il sourit mais il s’interroge à ras de terre, coupé du monde, seul dans sa tête. Et pourtant la danseuse menue s’achemine à pas menus vers cette personne inconnue pour lui apporter le réconfort offert par sa venue.

Un personnage à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baissent, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura, c’est le reste de lumière. Et pourtant la danseuse menue, illustrant le conte et le portant aux nues dessine dans l’air un peu cru la ronde des enfants perdus.

Venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, dans des wagons plombés travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique, la belle au sang noir. Et pourtant la danseuse menue détachant son regard de la nue trouve force et retenue pour aider tous ces gens inconnus à passer de la terre au salut.

Aurai-je la force d’aller au-delà vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout. Et pourtant la danseuse menue relève le front sans retenue pour partir vers des horizons perdus.

En haut, il y a comme du papier à musique aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été. Et pourtant la danseuse menue virevoltant sur la cavatine inconnue se dit que les notes vues valent bien celles que l’on a lues.

Toute la ville bouge. Du palais de la Berbie au mont Fuji-Yama, un périple d’une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident. Et pourtant la danseuse menue s’enhardit pour sauter au-dessus de tous ces obstacles griffus, heureuse et doucement émue.

Le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu, c’est ce que je vois dans l’interstice. Et pourtant la danseuse menue virevoltant autour du décor vermoulu, annonce à tous sans retenue, la fin d’un délire jamais vu.

Le géant a tourné la tête pour saluer leur arrivée. Et pourtant la danseuse menue s’arrachant enfin de ces bras velus gagne dans un envol bienvenu sa place dans le cortège impromptu.

M.R.

 

Le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu.

En haut il y a comme du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été.

L’orgue de Moucherel résonne, un allegro puissant.

Un personnage à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baisse, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura –c’est le reste de lumière. Il parcourt les sentiers de terre et s’isole dans ce monde.

C’est ce que je vois dans l’interstice.

 Toute la ville bouge. Du palais de la Berbie au mont Fuji-Yama, un périple d’une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident. La reine d’Angleterre s’est arrêtée dans son voyage et a salué Toulouse-Lautrec.

C’est ce que je vois dans l’interstice.

 Venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, dans des wagons plombés travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique, la belle au sang noir. L’Espagnol, le Portugais, l’Italien demandent l’asile... cette manoeuvre est bénéfique sur le plan industriel.

Le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée.

L’homme a posé là son visage, les yeux grand ouvert, on croit qu’il sourit mais il s’interroge, à ras de terre, coupé du monde, seul dans sa tête. Il s’offre une petite prière pour tous les hommes qui souffrent.

C’est ce que je vois dans l’interstice.

 Aurai-je la force d’aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout. Je rêve d’un monde nouveau.


 E.G.

 

Par chez nous on appelle ce moment le point du jour... C’est l’heure où l’homme triomphe de la nuit et l’homme à l’aube de ce jour-là avait fait le point de cette heure bleue : ce n’était ni trop tôt, ni trop tard pour ce faire, mais l’Instant était venu comme une urgence répondre à cette question divine qui lui était arrivée nuitamment et dont il n’avait à ce jour compris le sens... Il lui avait fallu du temps pour être, ce matin, au présent de sa vie, comme un présent d’ailleurs, à ces quelques jours de Noël. Il venait juste de le comprendre. Alors l’homme a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu’il sourit mais il s’interroge, à ras de terre, coupé du monde, seul dans sa tête... Si seul, mais d’une solitude apprivoisée comme ce brumeux bonheur d’être triste... C’est sur cela qu’il se questionne encore, comme sur la nostalgie, sa douceur et son amertume, tout cela est si contradictoire qu’il en est ému, bouleversé, il en perd la tête... Elle est posée là, sur le sable au bord de la grande bleue... « Aurai-je la force d’aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout... » Telle était sa question, fixant l’horizon et pensant à son ami, là-bas, de l’autre côté, lui écrivant depuis la Tunisie, juste séparés par cet immense flacon d’encre bleue renversée, gigantesque. Il faudrait un géant là-bas de l’autre côté. Il pensa « le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée », il aurait aimé arriver, échouer là avec ses amis, les meilleurs, et être reconnu, salué dans son identité ... Cela lui tournait la tête... descendre du manège comme à la fin d’une valse et que le décor continue à danser dans votre immobilité retrouvée. Il pensa à elle, Alicia, venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, travailler à la mine, à la verrerie ou à la centale thermique, la belle au sang noir... Alicia, elle, avait du sang bleu, elle était si noble, dans se moindres gestes et dans toutes ses pensées. Il ne pouvait qu’en être terriblement amoureux, elle si pure, si transparente : le goût des choses transparentes lui venait de cet amour absolu pour elle qu’il appelait Claire parfois, en son for intérieur. Il entendit dans ce silence leur chanson, celle d’un matin bleu comme celui-là, quand la mer est étale..., en haut il y a comme du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n’est que la fin de l’été, cela le rassure quelque peu... Il voulait que le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu, celui des blessures de sa vie aussi..., peu à peu, la Patience comme un Art d’espérer, une halte, une armistice dans cette vie contre la montre. L’heure bleue, enfin, c’est ce que je vois dans l’interstice..., des envies de musique et de fête et toute la ville bouge. Du palais de la Berbie au mont Fuji Yama, un périple d’une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident. Il savait le crépuscule en bord de mer, le sublime de l’orangé et du bleu mélangé vespéralement. Il revoyait cette aquarelle anglaise et les deux femmes en robe longue longeant la plage...   confidences féminines échangées à l’heure bleue qui se prêtait à cela.
Alors un personnage à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l’autre côté ou la baissent, lui s’offre, sa robe semble plus sèche, l’ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura - c’est le reste de lumière...Une lumière à la Turner, de celle qui transperce les plus épais brouillards, de celle qui viendrait d’un soleil au milieu de la nuit. Non, les temps n’étaient pas révolus...
Par chez nous, comme partout, cela s’appelle le crépuscule, celui des dieux aussi, le point presque final du jour, entre chien et loup, la clarté qui baisse. C’est l’heure où l’homme triomphe de sa journée. C’est le moment crépusculaire. La nuit va arriver, le soleil se couche de l’autre côté pour éclairer ailleurs, réchauffer d’autres humains. Tout sera possible alors.

N.P.

 

POURQUOI ?

L'homme a posé là son visage, les yeux grands ouverts, on croit qu'il sourit mais il s'interroge, à ras de terre, coupé du monde seul dans sa tête.
POURQUOI ?
Venue par la gare en même temps que les mineurs polonais, travailler à la mine, à la verrerie ou à la centrale thermique, la belle au sang noir.
POURQUOI ?
Aurai-je la force d'aller au-delà, vers une terre enfin hospitalière qui me remettra debout. POURQUOI ?
Le géant a tourné la tête pour les saluer à leur arrivée.
POURQUOI ?
En haut il y a comme du papier à musique, aucune hirondelle encore posée, ce n'est que la fin de l'été.
POURQUOI ?
C'est ce que je vois dans l'interstice.
POURQUOI ?
Un personnage à la robe sombre se détache, les autres tournent la tête de l'autre côté ou la baisse, lui s'offre, sa robe semble plus sèche, l'ancêtre, le témoin des temps révolus, sa tête grasse fait comme une aura -c'est le reste de lumière.
POURQUOI ?
Toute la ville bouge. Du palais de la Berbie au mont Fuji-Yama, un périple d'une heure trente accompli tambours battants entre Orient et Occident.
POURQUOI ?
Le démontage du théâtre de verdure s'effectue peu à peu.
POURQUOI ?

A.F.

 

page atelier

 

         

Ecriture à partir de fragments choisis

Etre fille de mineurs

Par chez nous, le ciel est parfois d’une insolence bleue. De ma terrasse je voyais tout Albi, du Puy St-Georges à la tour de Castelnau. Mais c’est demoiselle Ste-Cécile, cette grande oeuvre humaine, qui trônait dans ce magnifique décor. Au loin, sur un monticule, j’apercevais Notre Dame de la Drèche, puis Cagnac et Cap Découverte, notre nouveau parc touristique. Mais comme pour Alicia, pour moi, fille de mineurs, Cagnac et ses mines représentaient beaucoup de nostalgie... Oui ! Alicia aussi était fille de mineurs, son père était polonais.
Des mineurs polonais étaient venus par trains pour travailler à la mine, à la centrale ou à la verrerie. Ils vivaient la plupart à la colonie à Cagnac. Dans le nord, ils appellent ça les corons... C’est les cars Bécardy qui les amenaient sur le carreau. Puis ils descendaient au fond des puits de la Tronquier ou de Ste Marie. Pour leurs femmes c’était la peur au ventre qu’elles les voyaient partir redoutant le coup de grisou, chaque fois qu’ils descendaient au fond du trou, dès qu’ils rentraient dans la cage. Ils étaient simples ouvriers, contremaîtres, boutefeux ou porions. Mon père, lui, était boutefeu. Malgré cette peur permanente je suis très fière d’être une fille de mineur. Je regarde mon père. Il a posé là son visage, ses yeux grands ouverts, je crois qu’il me sourit, mais non ! Il s’interroge, dubitatif, mélancolique, sur ce monde qui est derrière lui, sur sa vie qui a été un combat. Car les jolies danses sont rares, on l’apprend bien plus tard. Après ce parcours, mon père profite de sa retraite bien méritée d’une dure vie de travail marquée par la silicose.
Assis dans son fauteuil, il songe et contemple les siècles, mon Hidalgo des causes perdues. Comme ce Cyrano triste, mousquetaire albigeois.
Mais être fille de mineurs c’est croire et respecter des valeurs comme l’Amitié...

M-C.B.

 

Promenade nocturne

Paré de son somptueux habit rouge-orangé, le crépuscule, au-delà de l’horizon, glissait inéluctablement vers l’infini le plus profond et attirait la nuit qui avançait lentement, légère et silencieuse, admirable dans sa robe de soirée au long voile de tulle gris-bleu transparent. Je m’invitais à une promenade nocturne pour admirer Albi dans son écrin de velours noir. Je commençais par les vieux quartiers où quelques lanternes diffusaient une lumière obscure sur le sol. Toutes les maisons étaient grises, sans relief, et les rues étroites ressemblaient à des tunnels qui auraient volé un peu de clarté au jour sur son déclin. Ce mauvais éclairage ne m’empêchait pas de trébucher sur les pavés mal nivelés et quelquefois absents. Je passais devant la maison natale de Henri de Toulouse-Lautrec et celle où Jean-François de Galaup, comte de Lapérouse, a vécu une partie de sa vie, avant de m’enfoncer, presque à tâtons, dans le cœur du Vieil Alby. Maintenant la nuit avait revêtu sa grande cape de drap bleu non lumineux. Pour la décorer, les anges, petites mains du grand couturier céleste, avaient déversé des milliers de pépites scintillantes qui s’étaient posées doucement, de façon asymétrique mais formant de jolies figures qui éveillent notre curiosité et notre désir d’aller flâner dans ce splendide jardin du zodiaque. La lune, la face toute ronde et souriante, vint rehausser ce décor déjà grandiose et répandit une douce lumière sur la ville. Mais ce beau clair de lune créait, dans ces vieilles rues sinueuses, des zones d’ombre et des effets d’optique impressionnants. Les maisons à encorbellements semblaient se rapprocher les unes des autres comme pour me barrer la route et m’empêcher de voir le ciel. Je crus entendre une voix faible qui montait des profondeurs du Moyen-Âge et qui disait : « il est minuit, dormez en paix, tout va bien ». Tout va bien peut-être, mais je ne suis pas rassuré ; je me sens oppressé. Il émane, de cet endroit, un mystère angoissant qui commence à m’obséder. Je pressais le pas qui résonnait comme le marteau sur l’enclume du forgeron. Je me retrouvais sur la Place Sainte Cécile où je fus ébloui par l’illumination magistrale de la cathédrale. Les faisceaux lumineux des projecteurs s’écrasaient contre les murs de briques rouges et éclaboussaient la façade toute entière jusqu’au sommet du donjon où le ciel avait posé une immense couronne d’étoiles. Chemin faisant, empruntant la rue Mariès puis la rue Timbal, j’arrivais à la Place du Vigan magnifiquement éclairée. Le teint, plutôt gris, des façades des maisons qui l’entouraient était rehaussé par un léger fard ton pêche. Tous les insomnieux et noctambules de la ville étaient là, assis à la terrasse du Pontié, devant une coupe de glace ou une boisson, pour jouir en toute quiétude de la tiède douceur de cette belle nuit d’été. Les serveurs se faufilaient habilement entre les tables à l’appel des clients. Une petite table ronde et la chaise qui l’accompagnait m’invitèrent à me joindre à eux. Parmi cette foule disparate, colorée et bavarde, mon nom est Personne.
Mes yeux furent émerveillés par le somptueux décor qui s’offrait. La Place du Vigan se déroulait comme un tapis avec, au fond, sa fontaine dont les multiples jets d’eau jouaient à celui qui montera le plus haut. Le Jardin National, primitivement Jardin de Choiseul, exhibait, dans la pénombre, son kiosque à musique. En 1763, pour remercier l’archevêque Choiseul de sa participation à la réalisation des travaux d’urbanisme, en particulier la construction du quai qui porte son nom, entre le Pont Vieux et La Berbie, les Albigeois donnèrent son nom au jardin d’agrément qu’ils venaient d’aménager. Toujours dans la même direction, je distinguais la lointaine façade de l’immeuble de la Caisse d’Epargne et devinais le grand jet d’eau du giratoire grâce aux petits éclairs qu’il lançait vers le ciel mais qui retombaient aussitôt. Le puissant clair de lune dessinait des ombres sur le sol comme l’eût fait le soleil. Le mirage de la ville est bien réel.
Et ce firmament qui s’ouvrait, tout grand devant moi, quelle merveille ! Bien calé dans ma chaise, tout en dégustant le café que j’avais commandé légèrement lacté, ça va de soi, je me laissais aller. Mon cœur est en partance possible. Quelle liberté soudain, enfin libre de choisir moi aussi ma destination et, au bout, la lumière céleste, divine. Hélas, les palabres de deux pipelettes, véritables moulins à paroles, assises à la table à ma droite, me fermèrent les portes de la rêverie. Parfois, les paroles de l’une couvraient les paroles de l’autre ; cela s’appelle la superposition, méthode économique que l’on devrait utiliser dans notre atelier d’écriture car, sur une seule face d’une feuille de papier on écrirait simultanément deux pages d’un texte. Soudain une voix se tu, une seule personne parlait, l’autre écoutait, yeux grands ouverts et bouche entrebâillée. L’instant était solennel. Sans vouloir écouter, j’entendis malgré moi le récit qui était, sans aucun doute, celui d’un cauchemar que la conteuse avait fait la nuit précédente. Je ne connais pas le début de l’histoire mais, lorsque j’ai pris l’émission, elle disait, « le cyclone continue de ravager les hauteurs d’Albi, les collines sont désertiques, la végétation souffre, les fleurs baissent la tête et regardent leurs pieds, tu dis que c’est un champ de tournesols, ils sont très affaiblis, le soleil les a abandonnés. La terre asséchée prend un aspect lunaire. Seul apparaît le Doigt de Dieu dans ce ciel sans nuage. Et je me suis réveillée en sursaut, oppressée. Ce Doigt de Dieu, c’est un signe, peut-être un avertissement pour les hommes qui ont bafoué la Parole de Paix et d’Amour qu’il nous a transmise ». Dans ma petite tête, je pensais, sans le leur dire, qu’il nous montrait tout simplement la route à suivre pour atteindre le ciel et accéder au Paradis. A chacun de l’interpréter selon qu’il se reconnaît pêcheur ou non.
Petit à petit la terrasse se vidait et les garçons de café s’empressaient de débarrasser les tables de leurs tasses, coupes de glace dégoulinantes et autres déchets. Les gens se retiraient pour terminer la nuit, très avancée, dans un lit douillet autour duquel Morphée aura vaporisé un doux parfum soporifique. A mon tour, je tirais ma révérence. Nonchalamment, je traversais la Place et j’allais à l’autre bout du Jardin National saluer Lapérouse qui, figé dans son habit de bronze, ressemblait à un mousquetaire à la retraite, bien droit dans ses bottes ; il songe et contemple les siècles…
Le démontage du théâtre de verdure s’effectue peu à peu, l’épais manteau de la nuit s’effrite inexorablement. Profitant de l’animation tapageuse de la nuit, discrètement, Crépuscule a passé le relais à Aurore qui apparaît, superbe dans sa blanche lumière. De plus en plus dorée et rayonnante, elle annonce l’arrivée du Roi Soleil. Au revoir la Nuit, salut le Jour.

 

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Alicia

Les us et coutumes de Lettonie sont bien différentes de celles de chez nous. Encore que…
Mes parents avaient une femme de ménage basque espagnole, une géante au cœur d’or qui avait une frayeur souveraine et irrationnelle de l’orage. C’était la première fois que je rencontrai un adulte qui disait avoir peur. Lorsque le tonnerre grondait on devait s’enfermer avec elle dans la buanderie, portes et fenêtres hermétiquement closes, dans le noir. Moi, c’est le noir justement qui me faisait peur et déclenchait un malaise proche de la claustrophobie. On est loin des us et coutumes… ? Pas tout à fait. Cet orage s’était produit juste après la toilette matinale et Maïté- c’était son nom- nous donna une leçon d’hygiène prescrivant –c’était une future infirmière- qu’on ne se lavait pas le visage avec un gant de toilette- elle trouvait cela sale- et qu’il ne fallait se nettoyer le visage qu’avec les mains. Quand j’étais à Riga, à la fontaine en train de me rafraîchir le visage, dans la chaleur de l’été son souvenir m’est brusquement revenu.

M-C.N.

 

Il ne fallait pas pour cela que tu t’angoisses, que tu t’imagines de sa part une quelconque désertion, un manquement à la promesse, une échappée infidèle vers une rencontre et une aventure possible. Elle guettait le centre et ses yeux se noyaient de larmes et tu te demandais pour qui cette eau jaillissait. Son temps de présence dans l’établissement était terminé, elle rejoignait son village, allait retrouver sa famille, ses amis, son entourage quotidien, rassurant, solide. Mais elle portait un grand chagrin dans le cœur et toi, l’esprit en déroute, tu souhaitais de tous tes vœux que tu restes ancré dans sa mémoire et dans son cœur. Mais c’est une question dont tu n’a jamais connu la réponse.

M.R.

 

Alicia,
Tu sais, tous les dimanches matin je rejoignais papa dans son lit… dans sa grasse matinée… la seule de la semaine… la mienne en partance vers son lit, sa chaleur paternelle. Papa aujourd’hui absent…il me manque. Tu sais, je sens encore l’odeur de La Dépêche dans les draps, l’imprimerie, celle « qui renseignait vite et bien « . Voilà pourquoi La Dépêche, comme le rugby sont associés à jamais à l’image paternelle… Peut-être pour ça que j’ai des besoins de café, chaque matin, au Pontié, dont l’effluve s’ajoute au besoin de lire ce que les autres appellent le torchon local… Je ne suis pas d’accord- j’ose pas le dire. Je lis Ferdinand, l’horoscope, la météo, la maxime du jour et puis aussi ce qui se passe à Albi et à Lavaur, là où était son lit, mon berceau…, le nid. Il lisait que j’arrivais, pieds nus. Les draps étaient encore chauds de maman, partie lui préparer le café et lui monter ensuite, tous les dimanches matin de leur vie. Oui, tu te rends compte… tous les matins de leurs dimanches elle fit comme cela. Mes parents… Avec le recul, je les aimais…, moi, cet accident. Ils m’ont eu si tard…, acceptée comme un lien réparateur entre eux… Aujourd’hui, en son absence définitive, je me demande ce que j’étais vraiment pour lui et comment il me voyait et pourquoi il m’aimait tant, était si fier de moi. Maintenant, dans mon manque de cette part manquante se pose le problème du fond…, de son vivant celui de la forme ne se posait pas.
Tu sais, hier matin, j’étais chez les Notani, j’ai pleuré comme à l’instant en écoutant l’hommage à un père mineur. J’ai tant de souvenir que je n’ai plus de mémoire précise. Tout est flou, si mélangé. Mais la musique, les parfums de mon enfance, coulent encore dans mes veines, grosses comme les siennes, « qui les voit, voit ses peines », disait-il. Comme il avait raison papa… à quel point. Il arrêtait sa lecture pour me faire des chatouilles. Parfois le jeu consistait à faire semblant de lire et je devais l’implorer… « papa, des guilis »… Pas le droit de rire. On se tenait par la barbichette. Ou bien il me chantait « mon papa ne veut pas que je danse la polka » et, invariablement, je répondais « il dira ce qu’il voudra, moi je danse la polka du roi, na ! »
Goldman a raison. Je croyais que c’était pour toujours mais cette jolie danse, la polka, est tellement , jamais , juste chantée, dans un lit, avec pour seul mouvement la danse des chatouilles…Papa… J’ai entendu hier qu’on parlait de lui, sur Radio Nostalgie : « ce n’est pas du sang qui coule dans nos veines mais la mémoire de notre enfance ». Ce n’est pas sa mort qui me fait de la peine, c’est de ne plus voir mon père danser. Ma première et dernière, et seule avec lui, le jour du baptème de son unique petite fille...
Oui, ce fut ma seule occasion, rare et chère à mon cœur. Pierre, mon père, mon papa Pierrot, au clair de ta lune éclaire-moi, tu étais le chef d’orchestre de ma vie, ,et aujourd’hui, seule parmi les hommes, je cherche un chef de chœur pour continuer ma route ici bas, celle que tu m’avais tracée, belle et droite. Me voilà parfois égarée dans les sentiers… Papa, quelquefois je suis perdue, éclaire-moi, ma chandelle est morte, réchauffe-moi, je n’ai plus de feu. Merci de me prêter si souvent des mots au bout de ta plume. Merci de m’ouvrir ta porte pour l’amour de Dieu et que mon chemin soit toujours lumineux… Mon vœu, à l’orée de l’année 2005.

N.P.

 

J’étais partie vers dix-sept heures de la forêt de l’Hermitage, près de Font-Romeu, où j’avais dressé ma tente pour atteindre, par un sentier dur mais accessible, le sommet du Mont Carlit et assister au lever du soleil qui est magnifique, surtout sur le versant espagnol.
Je devais passer la nuit dans un refuge situé sur le plateau aux chevaux, au bord d’un petit lac au pied du mont. Arrivée aux Bouillouses, le brouillard commençait à envelopper les crêtes. Il est imprudent de continuer l’ascension vers ce refuge, vous risquez de vous perdre, surtout lorsque la nuit est proche, me dit un autochtone. Ne tenant pas compte de son conseil je poursuivis ma route et, bientôt, me retrouvai complètement noyée dans le brouillard qui s’était épaissi subitement et coulait sur mes vêtements. La visibilité était nulle et la nuit arrivait. Après deux heures d’angoisse je réussis à retrouver le sentier des Bouillouses où je trouvai gîte et couvert à l’auberge de jeunesse, avec un grand soulagement.
Le lendemain je repris la route de très bonne heure tandis que le brouillard s’évaporait lentement, mais, hélas, lorsque j’atteignis le sommet du Carlit le soleil était déjà haut dans le ciel. Le paysage sublime qui s’offrit à mes yeux fut ma récompense mais je jurai qu’à l’avenir je me fierais plus à l’expérience des indigènes.

E.B.

 

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Ecriture à partir de lexiques personnels (extraits des textes précédents)

 

Bourg colombage mystère
Embellissement terrasse jardin
Forteresse donjon horizon
Cape couleur nuit
Chemin campagne lanterne
Forgeron table décor
Robe fard dentelle
Fontaine couronne projecteur


Dentelles nuit fard
Donjon terrasse jardin
Cape campagne forgeron
Robe fontaine lanterne
Chemin forteresse mystère
Table décor couronne
Bourg horizon colombage

E.B.

 

Regard en déroute, larmes échappées comme réponse au chagrin du coeur, pèlerin de la monotonie et de l’angoisse sans promesse d’une présence.

Direction mirage aux tournesols se poudrant d’aventure. Impression d’une ville à l’abandon, lointain monument s’éloignant dans la plaine, à l’endroit où famille et amis solides viennent en foule nous régaler d’un sourire qui pose question.

Le trottoir court toujours vers un paysage cigare qui au hasard du temps reprend figure humaine.

M.R.

 

La muette

Les yeux exprimaient la frayeur, elle se tordait les mains, son coeur battait la chamade, son sang se figeait. Elle dut s’arrêter près de la fontaine, le visage au bord des larmes. Elle voulait se maculer de la terre rouge d’ici, comme une pauvre folle. Cette nuit d’encre qu’elle aurait cru bienfaitrice, après cette triste journée, la ramenait inexorablement à des pensées tristes et sombres. Cette blessure de l’incident de la buanderie corromprait longuement sa mémoire. L’odeur si caractéristique de la « bugada », grande lessive bisannuelle où le linge trempait et blanchissait dans la vapeur de l’eau bouillante versée sur des cendres l’envahissait. La chaleur était étouffante, d’autant que portes et fenêtres étaient closes. Dehors elle entendait le roulement de tambour du tonnerre. C’était l’orage. Les us et coutume qui réglaient sa vie étaient bouleversés. La toilette hygiénique du linge avait été interrompue par le surgissement de la force brutale.
Elle était à un point de rupture. Son horizon l’enfermait dans la répétition d’un présent de solitude et de tristesse. Tout n’était que silence sur cette terre. Crise d’identité sans mot ni parole. Etat d’urgence. Telle est la chanson de geste d’un coeur simple de petite bonne au début du XXème siècle. Théâtre sans fard ni gant, juste de la sidération, dans ce petit « cantou » de la grande maison des Blandines. Fin de partie.

M-C.N.

 

Les mots bleus d’Alicia à Papa

Parfums d’enfance. Aurais-je trop de souvenirs que je n’ai plus de mémoire ? Alicia, souviens-toi, retrouve-la, ça t’aidera : ta vie, la mort de Papa ! Un matin ? Je ne le sais même pas. Et toi ? T’en souviens-tu ? Ils ont dit « la nuit dernière »... Ce que je sais c’est que c’était à quelques jours de son anniversaire de Vie... La semaine où il allait faire, nous faire cela, entrer dans sa quatre-vingt-onzième année ! Dans son lit, là-bas, il a dû être en partance une nuit. Ils ont dit « sa bronchite... il n’a pas souffert ». Qu’en savent-ils ? Les mots hypocrites, juste pour se rassurer... Enfin, maintenant, l’absence est là et enfuie la chaleur paternelle, à tout jamais et avec elle celle de l’imprimerie de La Dépêche dans les draps du dimanche matin, et le parfum du café de la grasse matinée, envolé aussi.
Retrouvé au Pontié. Cette effluve du petit noir matinal qui me fait toujours un pincement au coeur, me donne du vague à l’âme, comme si l’âme était un organe, présent parce que douloureux, même doucement. Et le rugby, c’est au Pontié aussi que j’en entends parler désormais. Pontié... Le même P majuscule que Papa, que Papaïx. Je revois sa belle Anglaise, ses pleins et ses déliés, sa langue appliquée dépassant de ses lèvres quand il la traçait. Un enfant souvent, Papa.
Oui. Trop de souvenirs. Plus que si j’avais mille ans. Ça fait du bien Alicia, n’est-ce pas ? Maman, j’étais un accident, mais que vous avez voulu malgré tout. Cela me plaît l’accident accepté... aussitôt promu, érigé en bâton de vieillesse. Maman, ces instants dominicaux rituels où, pieds nus, j’allais le rejoindre. Ce plaisir, merci Oedipe, toute une enfance à raconter, pour rendre hommage à un père ailleurs que chez un notaire. Parfums d’enfance qui coulent dans mes veines, comme le sang bleu de cette encre, torrent impétueux de mes mots qui sortent de ma plume, de ma bouche, de mes chants, de mes coups de fil..., comme une source intarissable qui dit mes mots, exutoires de mes maux. Oui, c’est du sang bleu qui coule, si fort que mes veines en sont anoblies.
Tu te souviens Alicia, les dimanches matins, la lecture associée aux chatouilles, au rire, au chant et à la danse, celle de la  « Polka du roi » ? Ah, Radio Nostalgie, doucement la musique du coeur, en sourdine, pianissimo. La mémoire olfactive fait naître toutes les autres. Envie de café. Et d’une cigarette juste après. Voilà donc tout ce qui m’attire au Pontié. Alicia, tu le savais, toi, ce port d’attache albigeois, en quoi il nous rapprochait de Papa, en quoi Albi est devenu Lavaur pour moi ? Albi, la vie... Lavaur... tu as compris ? Et cette chanson entendue dans mon café « Ce n’est pas sa mort qui me fait de la peine, c’est de ne plus voir mon père danser ». Oui, souviens-toi, tu as dansé pour la première et la dernière fois de ta vie avec lui, Papa Pierre, pour le baptême de ton enfant, pour cette grande fête qui fit de lui un grand-père. Tu sais qu’il était heureux ce jour-là. Quel sacré tour tu lui as joué, le plus beau qu’on lui fit. Alors, de fierté, il t’a invitée à danser. Quelle rare occasion : coeur, clair de lune, mon ami Pierrot, mon père, ce premier homme, mon chef de choeur, ma route éclairée, je te prête ma plume désormais, ta chandelle est morte, on le sait, mais je t’ouvre ma porte, pour l’Amour de Dieu, je te fais du feu, histoire de te réchauffer un peu, le temps de m’indiquer encore le chemin, de connaître tes voeux dans mes sentiers égarés : chaque nuit de chaque jour, à l’aube, quand l’heure est bleue c’est le triomphe, notre triomphe sur les ténèbres, Alice : l’urgence, nos questions, le temps, la solitude, la douceur de l’instant, le présent, l’amertume de la nostalgie aussi... il y répond. A l’horizon de notre ligne bleue des Vosges ou de la Méditerranée, sa tête est sur le sable, Pierre comme lui, même mot pour le désigner, même prénom pour l’identifier : le géant est présent, et dans son immobilité silencieuse j’entends la musique de son manège, le décor tourne alors et je vois mon père valser... Alicia, il ne savait pas danser. La mer sans arrêt me jure le contraire et je la crois, Alicia, sa chanson, celle des blancs moutons, et celle des hirondelles posées sur du papier à musique, là-haut, réglé sur fond de bleu céleste. C’est déjà la fin de l’été, de tous nos étés, un été 42 parmi tant d’autres, celui surtout où nous l’avions rencontré. Dix-huit ans nous avions à peine. Nos jeux étaient les mêmes. Bang, bang, cet Autre, cet Amour absolu. Là, là, il faut panser nos blessures. C’est l’heure crépusculaire de nos confidences, Alicia, de toi à moi, tu le sais, cette lumière, le soleil et nos dieux tout là-haut et tout là-bas, près d’un océan.
Je m’en souviens maintenant. La mémoire me revient. Papa chantait faux « Comme la plume au vent ». On disait « il va neiger » ou « il va pleuvoir », selon la saison. Il disait aussi de la poésie, il se souvenait... « Est-ce toi chère Elise ? O jour trois fois heureux, que béni soit le Ciel qui te rend à mes voeux, toi qui, de Benjamin comme moi descendu, fut de mes premiers ans la compagne assidue...». Maman Elise riait de ce même prénom, de ces mots bleus... Je riais aussi, l’enfance était du miel, le temps était béni et nous étions heureux. Notre bonheur était pur, l’air tout autour était d’une transparence à peine bleutée et nos rires étaient clairs, si clairs... Je les entends. Et leur éclat me brise un peu parfois.

N.P.

 

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Triptyques d'Albi

en gras: les fragments dictés, communs à tous.

Les feuilles s’enfuyaient à l’approche du vent. L’automne s‘habillait de son manteau de couleurs chatoyantes. Bien installée, blottie dans son confortable fauteuil de velours jaune et vert, Alicia regardait son émission préférée ; bien au chaud dans ses pantoufles

 

Le rouge-gorge dans l’arbre nu chante, tous les matins sous les fenêtres des chambres d’hôtel des sérénades aux amoureux, et moi je l'écoute, espérant qu’un jour il les chantera pour moi, assise sur ce banc dans le parc gelé

 

Rémi joue aux billes dans la cour de l’école avec Alicia, et tous ses amis pendant la récré, comme nous y jouions nous à l’époque de notre enfance qui est déjà si loin… Si loin cette insouciance qui était tout un bonheur

 

La route se défilait, la ville reculait, et tranquillement au hasard de toutes ces petites ruelles, je découvrais ma ville natale, dans laquelle je vivais, mais qui pourtant me semblait si inconnue et me laissait un air jubilatoire

 

L’esprit embrumé… Comme aussi l’esprit d’Alicia, tout était embrumé, nos esprits, nos vies, même et surtout l’air qu’on y respirait, nous manquions parfois d’oxygène. Nous étions si loin de cette cathédrale

 

Les tournesols rigolent, ils sont en fleur et dans les champs ces fleurs sont tournées vers le ciel bleu. L’été sous une chaleur torride je hume l’air frais et le vent d’autan à un goût salé.

 

M-C.B.

 

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Ecriture à partir d'incipit (triptyques) - cahier I

 

Chapitre 1 cahier bleu

Il se promenait dans l’azur. En cette aube d’été il portait haut son héraldique avec ses poings dans ses poches crevées de pèlerin de l’amour. Il se faisait mendiant de l’amour auprès du pont-levis du château de sa reine. Sa femme le reconnaîtrait-elle ? Sa femme. Dans un cauchemar cette nuit il a marché dans le jardin des morts, s’est perdu dans les treize kilomètres de corridors des catacombes romaines où gisaient plus de quarante mille morts. A sa sortie de la grande épreuve les cieux sont restés définitivement muets. Rien pour orienter son pas quand lever un pied pour retomber plus bas encore demande un effort quasi surhumain. Cet engloutissemnt lui a rappelé cette boue noirâtre, dernière, froide qui monte des puits inexorablement noyés. De la rancoeur, des illusions perdues. La femme qu’il a épousé il y a cinquante ans, il l’a installée dans un château de rocailles d’Albi. Trouvailles, semailles, sonnailles, grenailles chantaient la chanson de geste des épousailles, sous la treille du petit jardin ouvrier. Mais peu à peu dans son désir de la satisfaire il a ajouté la liste d’un petit inventaire à la Prévert - le congélo, le four micro-ondes, la cuisinière intégrée, Internet, le portable. Des vêtements à la mode et de marque, soin esthétique en institut, résidence secondaire avec piscine, les enfants, l’école, l’université, le chômage. Il s’est lourdement endetté tout en le taisant à ses proches. « il rumine des pensées vaches, seule une vraiment trop belle, on l’appelle liberté ». En vieux cégétiste « il est comme un voleur d’allumettes qui aurait mis le feu à la société, enflammé bien des coeurs, bien des têtes avec ses idées. On ne l’a pas condamné aux travaux forcés, tout était déjà fait, mais à choyer d’idées » comme dirait Gaston Puel. Il sentait qu’il s’était trahi, sa femme et lui avaient marché ensemble mais côte à côté, pas unis, comme l’atteste l’absence d’alliance à son annulaire pour raison de sécurité à son travail mais jamais remise depuis sa retraite. Ses doigts ont grossi. Sa femme, elle, en arbore une en brillants. Sa femme arrivera-t-elle à le reconnaître ? Car il avait changé. La vieillesse, les tracas, le train-train. Est-ce le même homme qu’elle avait aimé ? Peut-on condamner un homme de soixante ans ? Seuls les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles. Pouvait-on le souponner d’un mal compris contre l’humanité ? Le renoncement, la ruine, la faillite. Une dernière illusion. Il comptait qu’elle prendrait sa main pour le tirer du trou. Qui sait s’il ne comptait pas encore sur elle pour lui redonner ses vingt ans et courir à perdre haleine, derrière le pas trop léger de Livia sa belle romaine, sa chère femme, dans les ruines de l’Ostie antique. Est-ce une réminiscence ou une métempsychose ?

 

Chapitre 2

Les feuilles s’enfuyaient à l’approche du vent. Dehors. Il venait de reprendre Belle du seigneur et ses pensées étaient aussi errantes que les pauvres feuilles toubillonnaires emportées par un vent de folie. Mais lui était bien à l’abri au coin du feu, les pieds dans ses pantoufles. Le timbre de la sonnette d’Alicia sonne sur les pavés de la discorde qu’essaie de contenir entre ses colonnes le quotidien de la démocratie participative. La Dépêche est avalée par la bouche béante de la boîte aux lettres. L’automne, véritable instrument à vent fait tourbillonner le feuilles mortes. Les feuilles volantes sur papier glacé de la publicité affichent les mercuriales des supermarchés qui espèrent faire le plein. Elles proposent de véritables feuilletons de la consommation : la bavette pour pas cher et la crème patissière des mille-feuilles tournent à tout vent dans les courants aériens. La girouette de Monsieur Durand raisonne comme une pantoufle s’adonnant peut-être à quelque sujet d’ inconnu des humains. Les feuillures de ses portes et fenêtres ferment juste et repoussent les assauts d’éventuels vents coulis. Il aime à la folie ces tourbillons. N’a-t-il pas appelé sa maison Les Feuillantines. Un hommage malicieux au gâteau mais aussi au club révolutionnaire. Car Monsieur Durand est un chevalier errant en ce début du XXIème . L’indéfectible amoureux de LaBelle captive vient de reprendre entre ses mains fébriles Belle du seigneur d’A.Cohen. Quels ont été les hommes de la vie de sa femme ? Quels différents types d’homme a-t-il été pour elle ? L’ami, l’amant, le mari, le pourvoyeur, le père, l’âme soeur rarement. Quel type de pauvre va-t-il incarner ? La pauvreté de l’esprit, celle du coeur, celle du dénuement physique, de la maladie peut-être - encore que l’on puisse tirer parfois quelque bénéfice d’une maladie, alors non-, l’indigence, prendre les traits d’un mendiant, lui faire jouer le rôle de Pénélope ? Mais il n’est pas le rusé Ulysse. Il n’est pas non plus ce junkie à la dérive qui squatte, avec ses chiens et ses comparses, le Jardin National. Se dépouiller, être la véritable dépouille de sa vie passée morte. Sa joie serait parfaite si elle le reconnaissait sous les traits de ce mendiant de l’amour ou bien si elle ne le reconnaissait pas – car, s’il est fidèle à lui-même jusqu’au bout, n’est-ce pas ce qui risque d’arriver ? Qu’est-ce qu’elle reconnaîtrait en lui ? L’amour débarrassé des contingences matérielles, sociales, un peu trop passionnel, trop ardent dans le regard, le sourire qui désarme, qui accepte de faire tomber devant l’autre la libido et l’agressivité. Qu’attendait-il d’elle ? Faire tomber le masque, le dernier... celui de l’impossible transparence.

 

Chapitre 3

Le rouge-gorge dans l’arbre nu, une chance de commencement d’un probable poème sur le détachement. La lune rousse, la demeure grise, la neige à ma porte. Poème sans fin, rien de neuf sous la neige, l’hiver de la vie. Je suis dans la brume, dans le fond de la nuit gelée. Le rouge-gorge fait des gorges chaudes sur les basses branches du cerisier dénudé. Il a peut-être la grippe. Sentinelle d’une troupe de soldats détachés d’un corps pour une expédition hivernale. J’étale la gelée de groseille sur le pain de mon petit-déjeuner. Ma nuit blanche vient à peine de commencer. Rien de neuf sous le soleil, je suis comme veuf. Vieillir c’est être de moins en moins dans le monde et de plus en plus en face de soi. La solitude arrive avec son lot de frustration, le manque, l’isolement, l’abandon. Mais aimer quelqu’un cela peut aussi lui révéler la plénitude de la solitude. Vivre à la fois l’émerveillement et la solitude. A mes yeux, envisager chaque être comme une solitude, un monde à part, est le plus grand respect que je puisse lui accorder, par ces rigueurs d’hiver. Je cherche un peu de chaleur pour mes vieux os, sous les vêtements d’une nuit risible et nuisible. Quelques vers de la Ballade des Pendus me reviennent en mémoire « Villon a été condamné à mort. Il ne l’a pas été par la loi de hommes. Il a été grâcié et il a disparu. On ne sait pas ce qu’il est devenu. Peut-être va-t-il revenir aujourd’hui. » L’auteur court toujours sur les lèvres de chair de ceux qui le connaissent, parfois sorti du Lagarde et Michard pour la Ballade des dames du temps jadis. Mais où sont les neiges d’antan ? Le démontage du théâtre de verdure s’est effectué peu à peu. Le vent mauvais a emporté les dernières feuilles, seule la haie d’ifs garde sa parure au garde-à-vous, vigilante aux allées et venues des passants pressés. A hauteur de vue la neige, celle d’hier qui attend l’autre dit-on. La neige sur les toits de la ville rose, la lumière monte de la terre et pâlit la brique des murs. Albi n’est plus un morceau de Toscane arrimé dans un pays de mines et de ségala, elle n’est plus qu’un îlot insolite qui réfléchit notre lumière intérieure.Presse-citron quand on est dans la purée, pressoir de nos pensées, enfin presser les rangs contre l’hiver ennemi. Pauvre petit moineau raidit dans le froid que je serre dans mes mains pour le ranimer.

 

Chapitre 4

Rémi joue aux billes. Heureusement l’enfant paraît ! Et c’est, à chacun de ses nouveaux jeux, une joie, l’art d’être père à l’âge d’être grand-père. Ses billes qui tintent, le jeu des perles de verre n’était-il pas une métaphore de sa vie, reprise incessante et volontaire qui le menait vers le bonheur. Les femmes de ménage enseignent la vie aux enfants. De certaines je ne garde aucun souvenir agréable, d’autres plus tendre. Je me souviens de Maïté, une femme de ménage basque espagnole géante au coeur d’or qui avait une frayeur irrationnelle de l’orage. C’était la première fois que je rencontrai un adulte qui devait avoir peur. Mes parents, eux, avaient des problèmes de grands. Lorsque le tonnerre grondait on devait s’enfermer avec elle dans la buanderie, portes et fenêtres hermétiquement closes dans le noir. Moi cette attitude me déroutait et c’est le noir qui me faisait peur, déclenchait un malaise proche de la claustrophobie. Si je m’en souviens aussi précisemment c’est que ce petit événement avait été précédé par une leçon de morale. Cet orage s’était produit juste après la toilette matinale et Maïté nous donna, à ma soeur et moi, une leçon d’hygiène prescrivant -c’était une future infirmière- qu’on ne se lavait pas le visage mais seulement le corps avec un gant de toilette et qu’il ne fallait se nettoyer le visage qu’avec les mains, sinon c’était sale. Voilà qui remettait en cause les us et coutumes de ma famille où l’on faisait exactement le contraire. Je regarde Rémi jouer aux billes. Joue-t-il Pierre contre Paul dans le tintement d’agathe et de perles de verre ? Qu’apprend-il, entre ce tissu serré de relations, de la vie, du monde qui l’entoure ? Est-ce la même fascination qui anime le Joueur de toupie de Quentin de la Tour ? Fascination ou concentration d’un geste recommencé qui laisse peu de place au hasard, reprise incessante et volontaire qui le mène au bonheur et à la réussite. Rémi la fa si sol au sol. C’est son terrain de jeu. Quand se redressera-t-il pour regarder autour de lui ? Ce que peut lui apprendre l’écorce de l’arbre ? L’aile de l’oiseau ? Le sourire de l’être humain ? Il est dans l’univers des « encore ». En jouant, l’enfant expérimente cette forme première et indispensable du dialogue avec les choses où l’on se mesure à elles sans agressivité ni esprit de conquête. Une sorte d’ajustement qui permet de se comprendre. Il acquiert ainsi le sens du rythme : au lieu d’être submergé par un flot de sensations et de sentiments il s’astreint à fixer son attention et à scander ses mouvements. Il accède en fait à la conscience et au bonheur.

 

Chapitre 5

La route se défilait, la ville reculait, ce cauchemar l’avait longtemps obsédé. Cette approche du but qui se dérobait sans cesse. Changer de route, se laisser dérouter, perdre son chemin, peut-être était là le secret de tous les chemins mènent à Rome. Jubilatoire ! La notion de trajet exemplaire a-t-elle un sens dans une ville ? Ville-forteresse, ville-marché, ville-pont, ville-sanctuaire. L’espace urbain a été désacralisé. Cette désacralisation marque l’introduction d’une démocratie urbaine, comme l’atteste, dans le prolongement l’un de l’autre, les trois espaces ouverts que sont le Vigan, le Jardin National et la place Jean Jaurès. Elle fait reculer la charge sacrée de l’espace. La ville accumule mais elle met entre parenthèse l’étagement vertical. L’espace n’est plus orienté car il a perdu son animation temporelle. Les rythmes qui auparavant en faisait le lieu de procession et de conversion, de chute et d’ascension, de fécondation et de mort ne sont plus. On n’accède que lors de fêtes exceptionnelles comme le Carnaval, au mois de février, quelques rassemblements lors de nos luttes sociales ou humaines, quand la ville manifeste. Presque pas de pancartes, même sur un simple mur qui saurait nous émouvoir, car il restituerait un peu de matière friable dans ce monde de l’écriture. Quelques tags colorés signent l’univers des « jeunes en roller », près de Castelviel, gavroches modernes à la recherche de l’ivresse et de la sécurité. Quelle est l’essence d’un lieu, celui d’Albi ? Cette parure d’un chromatisme chaud et vivant qui émane de cette lèvre cuite ou crue dès le 12 ème qui a donné à Albi (la Blanche ?) son nom de ville rose ? St-Salvy vit d’un mouvement affairé et cependant peu rapide. La Gare, ou plutôt les gares sont l’impossible évasion ou le début d’une liberté neuve. Elle est bien souvent alibi. Prisunic autrefois disait le besoin, le désir, l’usure de la vie quotidienne qui exige inlassablement que l’on pourvoie à la Nécessité. Aujourd’hui Leclerc, Casino sonr rejetés à la périphérie. En fait le véritable lieu urbain est celui qui nous modifie, nous ne serons plus en le quittant, celui que nous étions en y pénétrant. Quel est le lieu qui a Albi à cette fonction ? « Et on ne trouve quelque chose que dans un lieu qu’on se crée jusqu’à s’y trouver soi-même, s’il est possible de se trouver ». Jubilatoire, non ?

 

Chapitre 6

L’esprit embrumé, mais légèrement, par les vapeurs de l’alcool qui faisait qu’il se sentait bien engourdi par la torpeur, il se contentait de regarder la vie, toute la vie par le verre cathédrale. Qu’écrire quand rien ne vient à l’esprit ? Associer l’Esprit à cathédrale. L’esprit du lieu prend les couleurs du temps, du rouge nuancé de grenat au rose bleuté le plus délicat. Brique sur brique... dentelle de pierre avec la porte de St-Dominique. La clôture du choeur de cet imposant navire présente une succession de niches abritant de remarquables statues de rois, de prophètes ou de personnages bibliques. Ceux-ci portent des phylactères où s’inscrivent des versets qui trouvent une réponse sur ceux que portent les apôtres à l’intérieur du choeur. Ainsi de part et d’autre de la clôture s’instaure un dialogue entre Ancien et Nouveau Testament. Les élus ont sur eux le livre de leur vie. L’esprit paillard préfère Quai de Choiseul l’Esprit du vin pour incarner l’esprit, trop léger et volatile, dans la bonne chère. Esprit divin, esprit devin. Quel sera mon destin sur la roue de l’infortune ? L’esprit des feux-follets qui court dans les cimetières la nuit inquiète les vivants et les bien-pensants et les enfants pas sages. Certains transgressent les interdits et saccagent les tombes, profanent les sépultures. Des dépouilles nues, dérisoires sous la lumière crue du jour. Indignation contre ces voyeurs-voyous ? Retour de la barbarie dans l’enceinte sacrée de la mort. Leurs doigts portent les bijoux des morts. La vague hippie ne prenait que les couronnes de perles qui ornaient les tombes pour s’en faire des colliers à petit prix. Le monde s’est durci, radicalisé. La peur s’est théâtralisée. Le rire aussi. Dieudonné fait des siennes. A-t-il rendu l’esprit ? Je m’écorche aux barbelés d’un enclos de silence. Où commence la censure ? Peut-on rire de tout ? Qu’en pensent les esprits forts ? Jusqu’où va-t-on tomber les masques, se dénuder ?

 

Chapitre 7

Les tournesols rigolent. Dans sa tête il tournait et retournait ses pensées. Héliotrope, tropisme, tropique du cancer, trop de piques, de pics qui le ramenaient inexorablement vers la mer, l’écume d’une vague qu’il sentait monter en lui et l’envahir, le submerger, l’engloutir dans une eau salée. Hélium, héliotrope, tropisme, tropique du cancer, trop de pics, trop plein, trop- perçu à troquer contre de savantes tropes de rhétorique qui nous ouvrent les horizons des métaphores. Je suis ramenée inexorablement vers la mer dont les vagues frangées d’écume roulent des pelles au sable de la plage. Je m’enroule dans le rouleau de la vague, sous le soleil dont les gouttelettes font loupe sur ma peau et me brûlent. J’admire l’équilibre des surfeurs. Ce tsunami qui me submerge, je dois me mettre à le sculpter. Cette crue est un baptême de mer d’amertume. Je ne sais si je ne monte pas trop haut à l’éperon de la proue du navire, mais je dois façonner cette vague avec de la terre, qui me résistera et vaincra le dégoût de toucher la terre qui crisse sous mes doigts, comme quand je cultive mes petits pots de fleurs, mes petits bouts de rien. C’est une discipline pour rencontrer ma chère planète par quelque bout que ce soit. Trop-plein d’images d’actualité, lot de Rmistes, d’Africains dont l’espérance de vie n’excède pas 47 ans, d’otages en Irak, de troubles au Liban. Trop perçu, trop difficile à assimiler. Etat de crise, souffrance, empathie d’impuissance, rejet de trop de matière. Je recherche l’inspiration dans une poche d’air pollué.

M-C.N.

 

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Ecriture à partir de photographies - cahier II

C'est la lecture d'un livre d'heures...

M-C.N.

En parcourant les venelles d'Albi

E.B.

 

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Ecriture en répons aux fragments d'héraldique - Blason d'Albi I

Il contemplait ce blason avec stupéfaction. Certain qu’il était d’avoir oublié un détail qui importait par dessus tout il maniait la pelle avec vigueur espérant en avoir terminé avant que la meute hurlante ne vienne le harceler qui se répandait en couches inégales, entrant dans une composition futuriste digne de figurer dans une anthologie partisane. Figure emblématique d’un terroir bien connu, la bête la crinière sage et bien peignée s’enhardissait au son de la cornemuse, destinée à redresser les torts ainsi que les tors et à représenter dignement la chute de la gens en robe grenat et parfois rouge selon le rang que ces gens là occupent, inondant les gauchers d’une poussière piquante, promettant simplement l’insatisfaction de toutes ses dents couronnées, rempart contre le soleil et son arrogance coutumière lorsqu’il se drape dans ses rayons.

M.R.

 

Et les gargouilles ouvrent grand la leur et pleuvent sur les passants sans parapluie, les petits tas n’arrêtent jamais la musique de leur manège dans sa tête... Elle va se mettre à l’abri... coulisses qui glissent devant Alice pénétrant enfin le lieu... argent, trésor, Délos dans le château d’Albi, caverne d’Ali Baba et balivernes aussi... Palais de la Berbie, griffes dehors, ne voulant pas lâcher ce trésor. Or Alicia le sait, sa fortune n’est pas là, elle lève les yeux au ciel si bleu de Ste-Cécile... oui, c’est cela, ce trésor, elle y fait une croix dessus, une croix en or, et elle croise ses doigts nus de toute bague... ah ! la pureté de ses mains. L’homme aux Trois soleils d’or comme chef de choeur... Elle ne le sait pas encore, celui d’Alice lui appartient, un nouveau bonheur irradiant son for intérieur, elle sourit et sort, de la lumière plein son regard fenêtre.

N.P.

 

Cette phrase, dans ma tête résonne, c’est normal puisqu’il s’agit d’un écu-son.
Les gens peuplant la cité en étant le ciment.
On peut imaginer qu’une porte servait à accueillir les nouveaux habitants, l’autre permettant aux indésirables de quitter la cité...
Voilà un lion bien dégourdi car il a vraiment su saisir les créneaux qui lui étaient offerts.
Une position bien inconfortable qui expliquerait, peut-être, un certain immobilisme ecclésiastique que certains ont remplacé, avec avantage, par une simple croix occitane porteuse de sérénité.
Ce qui explique que pour se protéger du soleil, il faut un couvre chef, pas forcément à dextre.
Eh bien, moi, j’ai séquestré la lune sans avoir recours à l’argent !

A.F.

 

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Blason II

 

La résonance de la pierre.
Le peuple ciment.
Le va-et-vient humain.
L’équilibre du lion.
La cruciale élévation.
Le soleil toujours levant.
La lune toujours poétique.
Pour terminer, je redeviens héraldique.

A.F.

 

Vivait un roi
Château de sable œuvre de l’homme
Portes ouvertes sur l’avenir Statue d’or œuvre d’art Religion, croix de vie Occitanie soleil d’oc
Planète lunaire autre vie autre lieu

M-C.B.

 

Il contemplait ce blason. La bête, la crinière sage, s’enhardissait. Les dents couronnées, rempart contre le soleil et son arrogance coutumière lorsqu’il se drape dans ses rayons.

M.R.

 

Gargouilles ouvrant grand leur gueule
Musique de petits tas de sable en mémoire
Pénétrer dans l’abri château for intérieur, caverne aux trésors d’Albi, de son Palais aussi.
La fortune n’est pas là mais au ciel pastel de Ste-Cécile Une croix sur le trésor, une croix en or
L’homme aux trois soleils dort dans le choeur de Dame Cécile
Du dedans, du dehors, les vitraux filtrent la lumière

N.P.

Mon nom est Personne, je suis l'énigme d'Oedipe trangressant le divin. Le vin me fait devin. Albi s'anime, remontent en mémoire des lieux- les Blandines, la cathédrale- mais aussi les luttes sociales nées autour de l'énergie minière et électrique, et des hommes d'aventure : Lapérouse et Toulouse-Lautrec. Sous le ciel bleu azur de croix occitane.

M-C.N.

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Ecriture à partir d'une trame- Quatre étapes d'un texte

 

 

1
Lorsqu’il tirait, sa boule, lancée avec force, fendait l’air, et dans un claquement sec chassait la boule adverse, prenait sa place et le point par la même occasion. L’adversaire était déçu et riait jaune.
C’est sans doute le rire un peu nerveux, celui que l’on arbore pour cacher son désarroi.
Poutant quel spectacle de voir les doigts agiles des dentelières jongler avec les fuseaux à une vitesse vertigineuse tandis que ceux du joueur caressent les boules amoureusement...
Après chaque hiver il y a le printemps, au bout du tunnel il y a la lumière céleste.
Ce sont des ronds de papier que l’on jette sur les nouveaux mariés à la sortie de l’église pour leur souhaiter beaucoup de bonheur.
Le rouge-gorge, dans l’arbre nu, ressemblait à une petite boule de plumes à l’oeil rond et brillant.
Deux automobiles haut de gamme, garées dans cet espace moyennâgeux créent un contraste amusant.
Sa vision donnait l’impression d’un beau tableau exécuté par un maître avec un bel effet de brume.

2
Le joueur de pétanque caresse sa boule amoureusement et, lorsqu’il la lance avec force, elle fend l’air comme un boulet de canon, chasse sèchement la boule adverse et lui subtilise le point gagnant de la partie sous les applaudissements des spectateurs.
Le sourire un peu nerveux des adversaires cache mal leur déception.
D’un savant coup de main il maîtrise les caprices de sa boule comme les doigts agiles des dentellières font danser les fuseaux à leur gré. Dans un ballet endiablé les fils s’entrelacent et un voile de dentelle, léger comme la brise naît de cette dextérité.
Les nouveaux mariés sortent de l’église, acclamés par les nombreux invités. Deux voitures haut de gamme, magnifiquement décorées de fleurs symboles d’amour les attendent et la lumière céleste leur ouvre la route du bonheur.
Voletant dans l’arbre du parvis, le rouge-gorge participe aussi à cette belle journée et, de son chant discret, leur adresse un cantique d’amour.

3
C’est la fête du quartier et, à cette occasion de nombreuses activités et stands sont proposés.
L’exposition d’aquarelles, peintures, petites sculptures et autres ouvrages très variés réalisés par les artistes du dimanche attirent beaucoup de gens, admiratifs devant ces oeuvres simples.
Trouvé vraisemblablement dans un grenier, un tableau poussiéreux représentant une rue dans la brume et légèrement grignoté par les rats donne lieu à des commentaires et critiques d’éventuels connaisseurs.
Les dentellières amateur font une démonstration de leur talent et de leur dextérité pour tirer de l’oubli, l’espace d’une journée, un métier disparu.
Mais le clou de la fête c’est le concours de pétanque. Il fait vibrer les spectateurs, surtout quand « La flèche » joue sa boule. C’est son adresse qui a valu son surnom à cet excellent joueur. Qu’il tire ou qu’il pointe sa boule fait mouche. Pour le vaincre, ses adversaires ne font pas dans la dentelle.
Et le rouge-gorge, perché dans le tilleul généreux de son ombre, de son oeil rond et brillant observe ce remue-ménage qui semble l’amuser.

4
Boule qui roule n’amasse pas mousse. Le sous-bois, assiégé par la brume matinale étale son tapis de mousse, doux comme du velours, de chaque côté du chemin creux.
La lumière céleste se faufile entre les branches des arbres, le parsème de perles irisées et transforme la toile tissées par l’araignée en dentelle incrustées d’éclats de diamant.
Un peintre, à la palette généreuse aurait réalisé un magnifique tableau aux silhouettes confuses.
Lentement la brume s’évapore et tout devient net et lumineux.
Le rouge-gorge et autres fauvettes chantent leur joie de vivre.
Un jour nouveau vient de naître.

E.B.

 

1
Les feuilles s’enfuyaient à l’approche du vent, on aurait cru qu’elles avaient peur de la tempête.
Pourquoi ces lumières trouant la nuit que l’on dirait suspendues aux étoiles par quelques fils invisibles.
Un rassemblement de bougies s’amusant à sur les perles de couleur.
Il me tarde d’accoster à cette ville brume à l’horizon lunaire.
C’est un défilé de mode improvisé.
L’annonce d’un coup de vent allait-il remettre les mots à leur place.
Il trompe celui qui n’a pas de malice, qui vit dans un monde différent.
Bonjour mon bonhomme lui dit le poète, pourrais-tu me dire si la ville de Larroque est encore loin ?

2
Voilà bien la ruse de l’homme pour arriver à ses fins
Cette plaine toute plate semble se dissoudre dans un lointain sidéral. Vais-je discourir, découvrir le tempo de cet orchestre invisible. La route se défilait, la ville reculait, l’envie d’espace devenait urgent Le temps de me dire de franchir la porte permettant de renouer les fils avec le monde de humains.
Quelle sottise se disait le poète. Je fais étalage de mon savoir Ils finiront en tourteaux plutôt qu’en petit salé.

3
Bonjour mon bonhomme, dit le poëte, pourrais-tu me dire si la ville de Larroque est encore loin ? Le temps me dure de franchir la porte permettant de renouer les fils avec le monde des humains. L’envie de vivre devient urgent.
L’annonce d’un coup de vent paniquaient les feuilles qui s’enfuyaient comme si elles avaient peur de la tempête.
Vais-je discourir, découvrir le tempo de cet orchestre invisible ? Quelle sottise se disait le poëte, je fais étalage de mon savoir alors que cette plaine toute plate semble se dissoudre dans le lointain.
J’ai, pour me diriger, ces lumières trouant la nuit, qu’on dirait suspendues par quelques fils invisibles, et ce rassemblement de bougies s’amusant à disperser des perles de couleur au long de ma route.
Comme un défilé de mode m’accompagnant pour ne pas que je me perde, s’amusant à tracer un chemin féérique, une voie en feu d’artifice. Spectacle pour les yeux et douceur pour le coeur.
Il me tarde d’accoster à cette ville brume, ville que je ne connais pas, qui me réserve son lot de surprise, avec des gens que je suppose affables, diserts, qui ne trompent pas celui qui n’a pas de malice.
De bonnes gens, en quelque sorte, parmi lesquels je trouverai peut-être l’Elue qui voudra bien m’accompagner sur ce chemin immobile, nous conduisant tout en douceur vers un destin enchanteur.

4
Le défilé de mode ouvre les festivités annoncées par voix d’affiches. Les radios locales, mobilisées elles aussi, nous ont transmis la nouvelle, insistant sur l’importance de la participation des gens de la commune. Les voilà donc, défilant l’une après l’autre, avec cette démarche si particulière, accentuant le déhanchement. Le couturier règle les passages de ses modèles demandant à certaines d’arborer un sourire enjôleur, à d’autres ce sera au contraire un visage fermé, comme si un ennui insupportable les accablait. Ces filles sont minces comme des lianes, elles ont des crinières somptueuses, de toutes nuances, noir de jais pour celle-ci, flamboyante rousse pour celle-là, coiffure mohican pour d’autres. L’assistance ne sait pas où donner de l’oeil, s’il faut admirer les tissus, la coupe tellement étrange des robes, les chapeaux aux formes tarabiscotées, susceptibles d’abriter trois ou quatre personnes d’un seul élan. Pour achever cette présentation, voilà les robes de mariées, toujours d’une blancheur nacrée mais qui se parent de couleurs diverses pour souligner une courbe, faire ressortir le gonflant d’une création étonnante. Le couturier apparaît. Les jeunes femmes l’entourent en applaudissant. Elles forment un groupe, regagnent les coulisses, dépassent celles-ci et continuent à marcher sur une route qui semble se diriger vers une ville brume, qu’elles ne connaissent pas et qui leur réservera son lot de surprises à affronter ensemble.

5
Elles s’enfuyaient à l’approche du vent. Lorsque cette fuite est le fait d’une multitude de jeunes filles ou de jeunes femmes, quel charmant spectacle . Elles poussent des cris apeurés, font semblant de trembler alors qu’elle ne risquent rien, certaines ont des foulées longues et légères, on dirait qu’elles touchent à peine le sol, d’autres semblent moins à l’aise, plus lourdes, l’effort se remarque davantage, pourtant la volonté est là, elles refusent de se laisser distancer, elles tiendront le rythme jusqu’à une aléatoire arrivée.
Tout ça à cause du vent. Qui est-il ? Où se loge-t-il ? A-t-il une demeure ouverte à tous les cyclones, ou repliée sur elle-même, aux issues incertaines. On aimerait le voir alors qu’il est invisible, pourtant il surgit en trombe, fait plier les arbres, avancer les bateaux en gonflant leur voile, soulève la poussière des chemins, porte haut et loin la voix des cloches, ravive le feu qui se mourait dans l’âtre, chasse les nuages menaçants, nettoie le ciel jusqu’à le rendre transparent. Mais aussi il hurle dans la tempête, s’en prend aux toitures un peu disjointes, rend la marche difficile lorsqu’on lutte contre lui. Par contre lorsqu’il nous pousse on a l’impression de chausser des bottes de sept lieues tant le pas se fait long. Il nous mène là où on ne le voudrait pas. Lorsqu’il se calme, sa caresse nous prend au dépourvu, un zéphir léger et odorant nous fait apprécier l’instant. Il dégage la route sur laquelle nous allons, nous promettant par sa douceur une arrivée limpide, un passage facile de cette porte ouvrant sur une nouvelle et rassurante destinée.

M.R.

 

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