Journal d'un atelier
Ecrire les centres de rétention en France ?
 
Cet atelier d'écriture en direction des enfants des centres de loisirs de Carmaux et de Saint Benoît s'est déroulé sur quatre mercredis, du 27 septembre au 18 octobre 2006, au centre culturel de Carmaux. Il s'inscrit dans le projet Réalisation d'un petit livre illustré mis en oeuvre par l'association Trombone (plasticiennes : Izabelle Ferrebeuf et Laurence Delort) en partenariat avec la Communauté de Communes du Carmausin, dans le cadre du 7ème festival organisé par la Cimade, Voyages, regards croisés sur les migrations. Il s'agissait d'écrire à partir de l'exposition photographique commandée par la Cimade à Olivier Aubert, David Delaporte et Xavier Merckx : « L’enfermement des étrangers sans papiers… des images pour comprendre ».

Histoires de papiers

Réalisé au centre culturel de Carmaux, du 27 septembre au 18 octobre 2006
Atelier d'écriture (10h)
Geneviève Rojtman- Toulouse-Action-Chanson et autres écritures
Atelier d'arts plastiques (10h)
Izabelle Ferrebeuf et Laurence Delort - association Trombone

format A5 - vendu à prix coûtant 5 €
contact : toulouse@cimade.org
 
L'atelier d'écriture

Les dispositifs d'écriture

Lors du premier atelier avec les enfants il nous a paru nécessaire de les informer en quelques mots du contexte dans lequel avaient été prises ces photographies, car certaines d’entre elles, des hommes menottés par exemple, ne disaient rien du statut de ces hommes. Ce pouvait être des criminels. Hors, justement… Nous avons donc donné quelques précisions : « Dans ces centres sont retenus des étrangers arrivés en France après avoir tout quitté en espérant trouver du travail, un accueil, une vie meilleure. Ils se retrouvent enfermés en attendant d’être renvoyés dans le pays qu’ils ont fui à cause de la guerre ou de la faim… Il y a 22 centres comme ceux-là en France, beaucoup d’autres en Europe. En France 30 000 personnes y séjournent chaque année jusqu’à un mois ».

Sur les neuf enfants ayant participé aux échanges ce jour-là deux d’entre eux connaissaient cette situation, en avaient entendu parler, notamment durant l’été. Il s’agit donc d’écrire à partir de photos qui témoignent d’une réalité jusque là peu connue, peu visible, même aux actualités (car les médias n’entrent pas dans ces centres). Mais, dans le même temps, il s’agit de faire écrire des enfants à partir de photographies, d’un découpage, d’un cadrage particulier de cette réalité. Avertis du contexte, les enfants voient ces photos autrement que si rien n’avait été dit au préalable… L’écueil aurait été de se maintenir dans la dénonciation et/ou la déploration d’une situation (« c’est injuste », « c’est horrible », etc.) et de passer à côté du comment écrire, qu’est-ce qui peut s’écrire à partir de ces photographies-là ?

 

DISPOSITIF D'ECRITURE 1- ECRITURE POETIQUE

" Etrangers", "sans-papiers"… ? Quelles associations les enfants font-ils sur ces mots ? Pour trouver d'autres mots recherche collective de tous les mots que l'on peut former avec les lettres et les sons de ces deux mots. Constitution des lexiques communs 1 et 2

Collecte de mots et constitution d'un troisième lexique commun. à partir d'une photographie :

On voit des corps, en rang contre un mur, du carrelage, une arme, des menottes, des mains croisées, des jeans, des blousons, des vestes, ...
Echange avec les enfants à partir de leurs réactions : ils n’ont pas de visage… pas de bouche (de parole ?), pas de regard, on ne peut pas les reconnaitre, c'est le visage qui fait qu’on nous reconnaît, comme homme, et en même temps comme personne (différente des autres).

Ecrire à la suite de chaque ligne d'un pré-poème (Visage). Construction du poème par strates (sur calques 1 et 2) : il s'agit à chaque fois de rajouter un mot ou deux, de faire se croiser les lexiques (1, 2 et 3) pour découvrir, établir, de nouveaux liens entre les mots.
En recopiant le poème sur le premier calque on ne conserve pas le pré-poème, seulement ce qu'on a écrit à la suite.

Lecture des poèmes

DISPOSITIF D'ECRITURE 2 - ECRITURE A PARTIR DE FRAGMENTS

1) Ecriture à partir de neuf photographies extraites de l'exposition. Une photo par enfant. Les photographies sont découvertes au fur et à mesure. Chacun écrit à gauche de la photo un mot en lien avec la photo ET à droite deux ou trois lignes à partir de ce mot, toujours en lien avec la photo (2-3 mn d'écriture par photo). Le n° de la photo est noté devant chaque mot et chaque fragment (afin d'en faciliter la combinaison).

Affichage

2) Différentes lectures :

- Mots et fragments sur la page, dans leur succession.

- Pour une même photo : chacun, à tour de rôle, lit ce qu’il a écrit.
Un autre texte, collectif cette fois, s’écrit « dans l’air » et mêle les registres

3) Résonances : chacun prélève ce qu’il veut dans les mots et les fragments affichés pour construire un nouveau texte de facture poétique (sans modifier les fragments).

4) Lecture des textes fragmentaires

5) Lecture des textes fragmentaires mis bout à bout

6) Lecture en résonance d 'un texte littéraire : extrait de Le Voleur de Talan- Roman, de Pierre Reverdy. Pourquoi Reverdy ? Pour ce thème du mur qui hante son œuvre... Mais aussi parce que la poésie de Reverdy n'a jamais cherché à copier le réel ni à en décalquer les contours. Dénuement volontaire du vocabulaire, économie des ressources syntaxiques : pas de symbolisme chez Reverdy. Son outil privilégié est le rythme .

 

DISPOSITIF D'ECRITURE 3- PASSAGES

1) OUVRIR DES FENETRES « EPI D’OR » … (mots du poème de Jennifer)
Chacun découpe une fenêtre où il veut dans une des 9 photos de son choix. Qu’est-ce qu’il y a derrière ? Choix d'une deuxième photo. Ecrire le passage entre les deux. 

2) Poèmes de Reverdy. Chacun fait ensuite glisser derrière la fenêtre chacun des six poèmes de Reverdy et prélève (recopie) deux à trois vers parmi ces poèmes, en lien avec la photo (la première ou la deuxième).

3) Lecture des textes ainsi obtenus (ces textes figurent dans le livre Histoires de papiers)

Lecture publique au centre culturel de Carmaux
le mardi 21 novembre 2006